L’IA en santé : Hippocrator ?
Tribune de Genève, 19 novembre 2024
L’IA fait des merveilles. Elle en fait tant, qu’elle tend à empiéter sur les deux autres grandes dimensions de l’action humaine. Magique sur l’efficacité des moyens, elle est muette sur leur moralité, comme leur alignement avec leur but.
Faut-il enfermer la liberté d’expression ?
Le Devoir, 7 novembre 2024
La liberté d’expression est la liberté publique sans doute la plus précieuse, parce qu’elle conditionne toutes les autres. Mais à partir de quel point son extension met-elle en péril son fondement social ?
L’héritage est-il contre-nature ?
Nouvel Obs, 25 octobre 2024
L’héritage semble la manière la plus naturelle et la plus immorale de s’enrichir : on n’y est pour rien, mais tout nous désigne : la volonté de nos parents, l’histoire de la famille, la logique du progrès.
Peut-on sympathiser avec l’IA ?
Libération du 4 septembre 2024
L’IA sera notre meilleure amie : encourageante, sans enjeux propres, toujours disponible, conforme à nos désirs les plus quotidiens et les plus vicieux. Mais n’est-ce pas fonder notre humanité sur une illusion ?
Le double exil de la maladie
Santé mentale, juin 2024
Est-on encore chez soi dans la maladie ? Et comment ne pas être malade dans une chambre d’hôpital ?
Philosopher pour de vrai ?
Nouvel Obs, 11 juin 2024
Peut-on faire descendre la philosophie de son piédestal sans la casser ?
L’IA est-elle une menace pour la créativité des artistes ?
Challenges, 31 mai 2024
L’IA peut faire mieux que Bach et de Vinci. Mais c’est confondre perfection (d’une forme conforme) et création (d’une forme informe), création que nous ne pouvons comprendre qu’en tentant de nous mettre à la place de leur auteur.
La verticalisation de la frontière
Tribune de Genève, 28 mai 2024
Alors même que le coût des conflits surpasserait infiniment leur bénéfice puisqu’ils rendraient la Terre inhabitable, les guerres de territoires demeurent. C’est qu’il y est peut-être moins question de territoires que de reliefs, de frontières que de hiérarchie, de ressources que de passions.
Peut-on domestiquer l’infini ?
Usbek & Rica, 17 mai 2024
L’IA peut tout faire, c’est pourquoi il faut la limiter. Ce qui implique de choisir — et donc de protéger les deux tiers de l’intelligence désirante et morale contre le tiers rationnel que l’IA reproduit, et qui cherche à optimiser chaque chose comme si c’était elle qui comptait, et non ce qu’elle nous permet d’atteindre.
L’ennui du rétablissement
Santé mentale, mai 2024
Se rétablir est le désir le plus intense qu’on puisse éprouver. Pensons à une simple rage de dents. Mais tout état pathologique n’est pas nécessairement soignable (maladie chronique, handicap, vieillesse), et le rétablissement n’est pas un simple “retour à la norme”, puisque la pathologie elle aussi, est normale. Comment penser un rétablissement à la fois problématique et sans objet ?
La culpabilité ou l’instinct du crime
Santé mentale, avril 2024
La culpabilité est une tâche indélébile, comme le sang sur la clé de Barbe-bleue. Elle peut entraîner une sanction, mais surtout un sentiment, qui est une pré-punition. D’où vient que plus on fait mal, moins on la ressent ? Est-ce simplement habitude ? Mais l’habitude la fait-elle disparaître comme un conditionnement, ou nous y rend-elle insensible, comme une dégradation ? Comment en juger sans un étalon transcendant tous les systèmes de valeurs particuliers ?
IA : Y a-t-il un pilote dans l’avion ?
Tribune de Genève, 18 avril 2024
L’IA peut tout faire. En externalisant l’intelligence, ne nous sommes-nous pas rendus superflus ? L’IA, gouvernement plus que gouvernail, tend en effet à inverser la logique de l’utilité en écartant de son système de fonctionnement l’humain, qui en est pourtant l’aune et l’objectif. Comment concilier puissance infinie et limites humaines ?
L’isolement : l’impossibilité d’une île
Santé mentale, mars 2024
Quelle est la bonne distance face au monde, à la société, à autrui ? Comment éviter à la fois la fusion toxique et l’éloignement désespéré ?
Se détacher de l’attachement ?
Santé mentale, février 2024
“Attachement” est un mot équivoque, qui renvoie à la sécurité (attacher sa ceinture), à l’affection (s’attacher à quelqu’un) aussi bien qu’à la dépendance (être attaché à une substance) ou à la violence (se faire attacher à un poteau). C’est dire la puissance de l’attachement, qui couvre toute l’étendue de la matière humaine.
Choisir l’infécondité deviendrait tendance
Tribune de Genève, 26 janvier 2024
Comment choisir de disparaître ? Les idéaux louables du malthusianisme écologique ou de confort doivent-ils avoir raison, dès la vingtaine, de notre prolongation ?
Qui m’écoute vraiment ?
Santé mentale, janvier 2024
On confond souvent la parole avec le langage, lui donnant pour fonction de transmettre un message alors qu’elle veut avant tout produire une reconnaissance. C’est mettre l’accessoire du sens avant l’essentiel du lien, sans lequel aucun sens n’est réellement entendu.
Pas de cadeaux pour Godwin
Tribune de Genève, 19 décembre 2023
À Noël, on veut éviter les silences et les polémiques. Les silences des gens qui n’ont rien à se dire, les polémiques des gens qui ont trop à dire, sachant qu’on peut résorber les silences plus facilement que les polémiques, qui excitent notre sens de la justice mais pas de la nuance.
La vieillesse, la joie du naufrage…
Santé mentale, décembre 2023
La vieillesse est une maladie incurable qui nous diminue, nous fait souffrir et nous tue. Dans notre traversée, elle est la succession de tasses qui nous fait pressentir l’inéluctable noyade. Mais elle témoigne aussi de sa longévité, et du point où nous sommes arrivés, qui tant qu’il n’est pas absorbé, comporte d’inégalables atouts.
L’obésité avalera-t-elle la pilule ?
Challenges, 23 novembre 2023
L’industrie pharma se frotte les mains, tandis que l’agroalimentaire, les salles de sports, les chirurgiens bariatriques et autres professionnels grossophiles ont les mains qui tremblent : la pilule anti-obésité aurait enfin été découverte. Attention cependant à ce que les calculs d’intérêt ne cachent pas la vraie nature de l’addiction, qui est moins la sensation d’un manque qu’un désir de trop-plein.
Chandler, ou la mort de l’homme rêvé
La Libre, 7 novembre 2023
Chandler nous a fait rêver pendant les 10 ans de la série Friends. Et pourtant, Matthew Perry a passé sa vie à lutter contre le cauchemar des addictions. Comment comprendre qu’on cherche des paradis artificiel quand on joue son meilleur rôle ?
Professeur assassiné, à qui la faute ?
Tribune de Genève, 31 octobre 2023
Au compte de qui doit être inscrit l’horreur de l’assassinat d’un professeur à Arras ? Des causes du fanatisme, ou des faiblesses de la tolérance ?
Comment se détendre dans le chaos ?
Santé mentale, octobre 2023
La détente vaut toujours mieux que la crispation, qui nous protège par paralysie. Et pourtant, il y a peu de situations propices à se détendre. Est-ce à dire que tout dépend de nous et que notre capacité à esquiver les coups suppose que nous n’en ayons pas peur ?
Yannick, un film sur le théâtre et la société
Tribune de Genève, 13 septembre 2023
Yannick, le nouveau film de Quentin Dupieux, est un chef d’œuvre. Dans le huis clos minimaliste d’un théâtre de boulevard, il dynamite l’emboîtement des rôles sociaux pour nous montrer la vérité de la vie. On assiste à la dislocation de trois espaces imbriqués et antagonistes : celui de la scène où se joue une pièce, de la salle où intervient brutalement un spectateur, du théâtre où le public est pris en otage.
Dis-moi quelle est ta frustration…
Santé mentale, septembre 2023
La frustration est l’interstice séparant à jamais le désiré de l’obtenu. C’est le signe du réel. C’est aussi le meilleure moteur de dépassement du donné. Charge à chacun de tracer la ligne entre persévérance orgueilleuse et obstination déraisonnable.
Kevin Spacey acquitté : le pari de la méchanceté
Tribune de Genève, 2 août 2023
Accusé d’agressions sexuelles, Kevin Spacey a fait le pari de la confrontation plutôt que de la contrition, attaquant dès 2018 l’hypocrisie de la société du spectacle dans une vidéo où il surjoue le méchant. Cinq ans plus tard, un jury populaire lui a donné raison à Londres.
La tendresse majeure
Santé mentale, juillet 2023
Aussi nécessaire qu’insaisissable, la tendresse est l’enveloppe de l’amour réel. Elle est la chose la plus précieuse mais la plus dangereuses des relations humaines, la plus souhaitable et la moins libre. À l’inverse du jugement moral, elle nous astreint à la fois à l’abandon et à l’autolimitation.
La coma éthylique d’écran
Tribune de Genève, 20 juin 2023
Les écrans nous possèdent. Et nos enfants par l’exemple qu’on leur donne et l’impossibilité apparente de réguler un objet qui est devenu un fait social total. Autant mettre une flasque de whisky dans la poche d’un alcoolique et lui demander de s’en servir pour écrire, travailler, aimer, se divertir — sans la boire !
Figaro Vox, 16 juin 2023 Le casque de réalité virtuelle dont Apple vient d’annoncer la sortie tente de relever les trois défis technologiques sur lesquels ont buté ses prédécesseurs : l’immersion sans noyade, l’action sans handicap, la relation sans imposture. Y parvient-il ?
Santé mentale, juin 2023 Comment peut-on faire du mal à quelqu’un qui soigne le mal ? Est-ce folie ? Méchanceté ? Ou idéalisation déçue ?
Libération, 1er juin 2023 La Suède a supprimé les écrans de ses écoles pour en revenir aux manuels scolaires. Décision évidente. L’écran absorbe l’intelligence. Pourquoi ne l’a-t-on pas prise plus tôt ?
Santé mentale, mai 2023 Le soin de l’autre est essentiellement moral, mais dépend de conditions matérielles dont la logique peut parfois contredire la morale, de sorte que le soin se trouve dans une contradiction entre ses finalités et ses instruments. Comment affronter cet antagonisme ?
Le quoditien du pharmacien, 27 avril 2023 Le pharmacien partage l’ambivalence du quotidien : à la fois nécessaire et dévalorisé. Or, au confluent du commercial, du social et du médical, il est un acteur primordial de la santé publique. Comment reconquérir son image d’acteur de santé à part entière ?
Libération, 13 avril 2023 Quand les problèmes descendent de la sphère intellectuelle sur le terrain de l’opinion publique, ils changent de forme. Ainsi l’euthanasie, dont l’enjeu tient moins à l’opposition entre dignité de la personne et sacralité de la vie, qu’entre volonté individuelle et abus collectif. Comment a-t-on pu confisquer si longtemps le débat ?
Santé mentale, avril 2023 L’humeur est un non-concept. Tout comme la boue platonicienne, dont l’indéfinissabilité la prive d’idée, l’humeur est insignifiante, sans but ni pourquoi. Et pourtant. Ses variations peuvent parasiter notre vision du monde. Son épaississement la déformer, son opacification l’abolir.
Tribune de Genève, 23 mars 2023 Le sexe est tabou, et c’est pourquoi il est si délectable et si dangereux. Le faire entrer à l’école, c’est risquer de court-circuiter et la motivation à apprendre et les barrières à respecter. C’est pourtant la seule façon d’offrir aux jeunes les outils pour se diriger dans un monde où le porno est à portée de clic. Santé mentale, mars 2023 La compétence, contrairement à l’instinct égalitaire et ajusté à son but, est hiérarchique et créatrice de logiques propres. Elle produit ainsi à la fois la puissance technique et les inégalités sociales, et un cadre de pensée qui peut descendre vers la performance ou s’élever vers la créativité. Nouvel Obs, 19 février 2023 L’intelligence artificielle porte mal son nom puisqu’elle repose sur une double confusion entre information et savoir d’une part, calcul et création d’autre part. “Artifice intelligent” serait plus adapté, insistant sur la matérialité de ce qui n’est qu’une excroissance de notre propre intelligence. Santé mentale, février 2023 L’héritage signifie à la fois l’enrichissement et le deuil, la transmission d’un bien et la disparition de ses porteurs. Or cette ambivalence de l’héritage est la modalité matérielle d’une ambivalence plus profonde, sociale et personnelle. Tribune de Genève, 24 janvier 2023 Le dernier-né de l’intelligence artificielle promet de répondre à toute question possible, mais surtout de comprendre les questions en se souvenant des échanges antérieurs, parvenant ainsi à reproduire l’intelligence humaine de façon indétectable, comme le prévoyait Alan Turing il y a 70 ans. Sommet de la technologie, ou synthèse ingénieuse d’internet ? Santé mentale, janvier 2022 Contrairement à la maladie du corps dont on peut se tenir à distance, la maladie mentale nous atteint au cœur, comme si le corps prenait définitivement le dessus, disloquant l’esprit dans un mécanisme arbitraire. Sauf que l’esprit garde une logique, souvent plus effrayante qu’une pure incohérence, et que le corps exprime, notamment par des symptômes, le sens d’une maladie qui ne se réduit pas à des avaries neurologiques. Nouvel Obs, 3 janvier 2023 Le “Janvier sec” est une campagne de sensibilisation qui vise, par le défi de ne pas boire pendant un mois, à “questionner notre rapport à l’alcool”. Pourtant, sous ses airs de modération de bon aloi, cette incitation méconnaît à la fois ce qu’est une consommation problématique et les implications intimes du sevrage. Santé mentale, décembre 2022 Le narcissisme est un amour de soi démesuré et mortifère, comme le raconte le mythe de Narcisse. Le problème est alors de savoir ce qui différencie cet amour-propre extérieur de l’amour de soi confiant qui n’a pas besoin de démonstrations extérieures pour se rassurer. Et de l’orgueil aux mille tours qui prétend être modeste pour être d’autant plus admiré. L’Écho, 10 décembre 2022 L’éco-anxiété est considéré comme un trouble mental. N’est-ce pas au contraire une vision trop lucide pour passer inaperçue ? Comment lutter contre un cataclysme imperceptible, sinon par une angoisse démesurée ? Santé mentale, novembre 2022 Le traumatisme est le gouffre ouvert par un événement insupportable, qui aspirera désormais les souvenirs pour leur donner la même forme, celle de ce trou où notre personne s’est effondrée. Comment expliquer que la mémoire, docile faculté, nous impose soudain de revivre ce qui n’aurait jamais dû se produire ? Huffington Post, 2 novembre 2022 Quel rapport entre une star hollywoodienne et un gynécologue parisien ? Une ligne de défense, l’acteur se cachant derrière son personnage, le docteur derrière son expertise. Des abus sexuels couverts par la fiction ou la physiologie. Comment interpréter cette symétrie ? Tribune de Genève, 3 octobre 2022 Rien de plus limpide, au premier abord, que la légitime défense : on y défend sa propre vie. C’est un concept hybride cependant, ancré à la fois dans l’instinctif qui le motive et le droit qui le justifie. Et cette double inscription naturelle et juridique le rend susceptible d’être étendu à des situations sociales et politiques qui n’ont plus rien de naturel. Santé mentale, octobre 2022 Si l’inceste est le pire des crimes, pourquoi le commet-on ? et s’il est relatif du point de vue culturel, pourquoi provoque-t-il une répulsion universelle ? Challenges, 14 septembre 2022 L’inflation se définit comme l’érosion monétaire, un phénomène qui serait aussi irrépressible que l’érosion géologique et les tremblements de terre. Seulement si les prix augmentent, la valeur des choses, elle, ne change pas. Comment comprendre cette “valse des étiquettes” ? Santé mentale, septembre 2022 Si l’être est complet, par définition, d’où vient le changement qui suppose une destruction ou une nouveauté ? D’une illusion liée à notre position dans l’espace-temps, illusion où notre capacité à créer contrecarre la tendance du monde à se dégrader. Santé mentale, juin 2022 L’adolescence : crise hormonale ou contradiction sociale ? chrysalide néfaste ou camisole familiale ? physiologie ou sociologie ? Santé mentale, mai 2022 Les médecins peuvent avoir mauvaise réputation, soit par leur ascendant, soit par leur servilité, ce qui correspond schématiquement à deux moments de leur histoire, mais surtout à deux dimensions du soin, le care et le cure, que seule une communauté soignante peut équilibrer. Challenges, 27 avril 2022 Les lunettes connectées annoncent un prochain “iPhone moment” selon Mark Zuckerberg, la révolution technologique du métavers. Mais en touchant à la vision, ce projet a des implications cognitives, sociales et méta… physiques qui peuvent conduire à un rejet analogue à celui dont avaient été victimes les Google Glass. Santé mentale, avril 2022 On ment pour tirer bénéfice d’une réalité déformée. On peut aussi transgresser la norme sociale elle-même, qui n’est qu’un mensonge unanime. À ne pas confondre avec le mensonge pathologique où, au lieu d’être chef d’orchestre d’une réalité augmentée, on est victime d’un imaginaire contradictoire. Santé mentale, mars 2022 Un conflit peut concerner les moyens ou le but d’une organisation, c’est-à-dire son efficacité ou sa finalité. Il est donc une forme normale d’interaction entre volontés libres, mais qui tend à se dégrader en antagonisme. Comment transformer le conflit en or du collectif et non en plomb de la rivalité ? Santé mentale, février 2022 Ne plus manger est un rêve pour la plupart d’entre nous. Contrôler notre alimentation par la diététique, la réduire par des régimes, la contredire par des jeûnes est devenu une vertu centrale. En quoi l’anorexie n’est-elle pas la prolongation héroïque de cette sobriété grossophobe ? Santé mentale, janvier 2022 L’accueil est davantage que le seuil d’une maison, c’est une maison où l’on n’en finit pas d’entrer, une disposition fondamentale des individus leur permettant de dépasser leur altérité réciproque pour produire quelque chose de commun, qui est plus que la somme de ses parties. Santé mentale, décembre 2021 Avoir un enfant est une multiplication et une division. Comment faire pour que l’une l’emporte sur l’autre, que la fécondité de l’enfant réel l’emporte sur l’intimidation de l’enfant rêvé ? L’Écho, 16 novembre 2021 Comment une campagne de communication européenne prônant la tolérance a-t-elle pu être accusée, d’un côté à l’autre de l’échiquier politique, d’encourager la guerre des civilisations? Santé mentale, novembre 2021 “Un esprit sain dans un corps sain” : même la formule égalisatrice de Juvénal repose sur un asservissement du corps, dont la santé n’est rien de plus que la solidité d’un piédestal. Et si le corps, plus universel que la raison, était ce qui nous maintient dans les bornes du sinon du pensable, du moins du vivable? Tribune de Genève, 3 novembre 2021 La bienveillance est un nouvel impératif catégorique, tout comme l’honneur ou la morale en un autre temps. Le problème de ce précepte est qu’en voulant nous purifier, il interdit la critique, psychologise le conflit et condamne notre nature profonde. L’Écho, 23 octobre 2021 Les antivax sont des gilets jaunes de la santé qui contestent par principe l’ordre imposé d’en haut. Mais alors que les options économiques renvoient au juste et à l’injuste, et donc au débat et aux opinions, les options de santé publique renvoient aux bénéfices et aux risques, et donc au calcul et à la vérité. Santé mentale, octobre 2021 Alzheimer détériore moins la santé que la relation à soi et aux autres. Mais cette détérioration n’est pas seulement matérielle et absolue, elle est elle-même une relation entre un amoindrissement de la personnalité et une habitude, une attente, voire une exigence d’une certaine réponse de la part d’un autre qui n’est plus là. Santé mentale, septembre 2021 On peut enfermer les personnes nuisibles pour deux raisons : les punir ou les protéger, rectifier une subjectivité qui veut le mal, ou la préserver d’un mal qui s’impose à elle. Dans les deux cas, la coercition ne semble profitable que limitée, voire commuée en soin. Le Journal du Dimanche, 8 août 2021 Comment en est-on venu à comparer la pointe du progrès à la Solution finale ? La combinaison des sciences, des techniques et des politiques publiques les plus remarquables, à une dictature masquée ? On a confondu la route passée avec la conduite future : la raison n’est jamais acquise. Santé mentale, août 2021 Pour sauver le maximum de personnes, nous avons constitué une dette colossale. Il paraît naturel de sacrifier du papier-monnaie à la vie des individus. Mais ce papier-monnaie qui nous est si cher, tout conventionnel soit-il, a ses propres lois, qui coûtent à ne pas être respectées. La question est : qui va payer ? Tribune de Genève, 30 juin 2021 La voiture autonome est une des merveilles technologiques qui nous promet des lendemains qui chantent, défaits de l’ennui de conduire, du risque d’accident, des embouteillages, de la pollution. Mais ne pourrait-on pas l’interpréter aussi comme une utopie déresponsabilisante qui chercher à débrancher les conducteurs plutôt qu’à les éduquer ? Le Journal du Dimanche, 17 juin 2021 Pourquoi dépenser des millions pour sauver le soldat d’une armée fantoche ? Santé mentale, juin 2021 La rechute dans la drogue est-elle véritablement une nouvelle dégringolade — mais pourquoi ne s’en être pas gardé ? — ou des retrouvailles avec un monde quitté à regret — mais pourquoi n’y être pas resté ? Huffington Post, 1er juin 2021 Faut-il laisser dormir Blanche-Neige pour l’éternité plutôt que de lui faire subir l’agression sexuelle que constitue un baiser non sollicité de la part du prince, tout salutaire soit-il ? La Cancel Culture nous somme ainsi parfois de choisir entre la peste de la pensée unique et le choléra de la discrimination implicite. Huffington Post, 5 mai 2021 La panique morale du chimérisme homme-singe tient moins au risque du monstre que de la liberté atténuée. Manipuler l’humain n’est inacceptable qu’en cas de diminution de sa capacité à s’auto-définir. Santé mentale, avril 2021 Il faut s’adapter pour survivre. Sauf l’être humain qui a décidé d’adapter le monde à ses besoins. Et pourtant, cette adaptation du monde civilisé a ses limites, notamment par son inertie et sa contre-productivité. Plus encore, les choix dont il procède sont susceptibles d’être mis en cause dans leur principe et non plus dans leur utilité. Challenges, 13 avril 2021 Comment décider qui vit et qui meurt ? La question du critère renvoie à des principes qui, tous discutables, se caractérisent par le fait de hiérarchiser les individus par rapport à une finalité supérieure, ce qui, en un sens, est l’immoralité même. Aussi le tri nous oblige moralement à faire quelque chose d’immoral. Huffington Post, 24 mars 2021 Le viol est le crime d’être soi. Il cause une souffrance circulaire que rien ne termine, sinon la justice, ou du moins la reconnaissance de cette violence intime, à la fois monstrueuse et familière, destructrice et structurelle. Santé mentale, mars 2021 Le suicide fascine parce qu’il sacrifie l’essentiel au nom d’un jugement que la mort rend absolu, et pour ainsi dire vrai, comme si ce n’était pas la vie qui pouvait donner raison, comme si la mort était un argument. Challenges, 20 février 2021 Mars fait rêver. Trop. Car ce rêve d’épopée martienne n’est peut-être qu’une métaphore pour notre (in)capacité à nous éloigner de nous-mêmes. La catastrophe est moins ce qu’on fuit, que de croire qu’on peut fuir. Santé mentale, février 2021 L’animal, c’est nous, moins ou plus quelque chose ; l’une des figures les plus manifestes et les plus mystérieuses de notre inquiétante étrangeté. Challenges, 15 janvier 2021 Comment un malade mental est-il parvenu à dominer le monde ? Santé mentale, décembre 2020 Quand une personne change de sexe, on a tendance à se poser trois questions successives : 1) Est-elle folle ? 2) A-t-elle toujours été de l’autre sexe ? 3) Correspond-elle bien à ce qu’on entend par transgenre ? C’est dire si l’identité sexuelle remet en question un des fondements de l’ordre social, ordre entendu au double sens d’ordonnancement matériel et d’injonction morale. Santé mentale, novembre 2020 La pensée avale le monde. Et parfois, elle régurgite des expériences néfastes, elle mâche indéfiniment des cercles logiques, des inquiétudes, du vide compacté. Comment penser cette rumination, c’est-à-dire une pensée toute présente, mais qui obstrue la vie ? Santé mentale, octobre 2020 Le pan-médicalisme consiste à étendre l’exigence de sécurité et de prévisibilité de nos sociétés à une santé qui ne s’y prête pas. C’est aussi confondre le niveau des biens convoités avec celui des valeurs admirables. Le devoir, 21 septembre 2020 Le clivage états-unien a dépassé le stade des arguments, il relève désormais de la foi, et donc d’une dimension qui, au lieu d’ouvrir le débat, renvoie dos-à-dos des certitudes entre lesquelles le vivre ensemble menace d’être écrasé. Huffington Post, 10 septembre 2020 Il y a des mots qui donnent la parole et des mots qui la coupent ; “ensauvagement” est de ceux-là. Il termine la discussion en séparant les uns des autres, les sauvages des civilisés. Comment un tel mot animalier a-t-il pu se trouver soudain employé par des figures si diverses, de l’extrême-droite dont c’est une marotte, à une partie de la sphère politique et jusqu’au ministre de l’Intérieur ? Le Journal du dimanche, 6 septembre 2020 Une résistance absurde s’est fait jour au sujet de la 5G : ce serait une technologie à la fois dangereuse, consumériste, polluante, intrusive, voire manipulée par un complot. Refus millénaire du progrès ou questionnement légitime sur une avancée à l’utilité discutable ? Santé mentale, septembre 2020 Un fou peut-il faire appel d’une décision médicale ? N’est-ce pas donner l’avantage au délire sur le diagnostic ? Le Journal du dimanche, 14 août 2020 Nous avons accepté le bruit comme une fatalité, de même qu’à une autre époque les 25 000 morts/an sur les routes. Pour que le bruit devienne l’exception, il faut réduire le bruit, non pas dans sa puissance — il est des bruits justifiés — mais dans son rôle, qui aujourd’hui est d’exprimer un statut social. Challenges, 10 août 2020 La distanciation sociale provoque des violences pouvant aller jusqu’à la sauvagerie. Comment expliquer que des règles de bon sens puissent déclencher de telles réactions ? C’est qu’une épidémie, précisément parce qu’elle menace tout le monde, fait ressortir une distance sociale antérieure à la pandémie, plus profonde et moins acceptable. Santé mentale, juillet 2020 À 20h, chaque jour du confinement, on applaudissait la vertu de ceux qui prenaient soin des autres. Mais leur travail n’était-il pas à la fois obligatoire, rémunéré et solidaire ? Alors : héroïsme ou intérêt bien compris ? Don de soi gratuit, ou forme supérieure de prévoyance ? Droit & Santé, juillet 2020 La pandémie a conduit à une brusque contamination du droit positif, désormais soumis au droit naturel à la vie. Ce qui était cadre légal devient carcan procédurier, ce qui protégeait notre liberté devient menace pour notre vie. Peut-on sortir de tout cadre légal pour sauver des vies, ou peut-on au contraire définir des principes qui résistent à la peur de la mort ? Santé mentale, juin 2020 Guérir n’est pas un retour à la normale, car il n’y a ni norme, ni retour. La guérison repose sur des infrastructures sociales (modes de vie, hygiène, vaccins, antibiotiques), plus que sur une médecine technoscientifique qui rétablirait de force une santé idéale. Elle est avant tout un sentiment qui renvoie à son tour à une inscription sociale. Aussi la guérison doit-elle être considérée comme un phénomène indissolublement physiologique, subjectif et social. Huffington Post, 21 juin 2020 Une statue est davantage qu’une trace ou une commémoration: c’est une célébration, le façonnement d’un modèle, la transcendance non seulement d’un personnage et d’une vertu, mais d’un principe. Elle constitue un idéal à imiter et une origine à reconnaître. De pair avec les noms de lycées, de boulevards, d’aéroports, la statuaire peuple la réalité courante de sa valeur symbolique pour d’un même geste consacrer et banaliser une vision du monde, et finir en évidence. La question est donc : sur quelles évidences veut-on établir notre société ? Tribune de Genève, 17 juin 2020 L’enseignement à distance peut paraître le meilleur moyen de gagner du temps, un recours, voire un moyen de réduire les coûts de fonctionnement. Sauf qu’enseigner suppose une présence sans laquelle il n’est qu’épandage solitaire. Santé mentale, mai 2020 Peut-on aider quelqu’un ? Il est si difficile de s’aider soi-même… Aider quelqu’un, c’est d’abord lui fournir ce qu’il ne peut plus se donner à lui-même, c’est donc moins l’aider que l’alimenter. Pour aller plus loin il faut mettre de limites. Limites institutionnelles, limites personnelles. C’est dire qu’il n’y a d’aide que mesurée. Tribune de Genève, 8 mai 2020 Les causes de la pandémie semblent nous intéresser plus encore que ses conséquences. Seraient-ce les Chinois ? les pangolins ? les scientifiques ? la déforestation ? le progrès technique ? les politiques ? Le cosmopolitisme ? La recherche de cause devient chasse à courre, et la cause bouc-émissaire. Santé mentale, avril 2020 Avant d’être une expérience spirituelle, la solitude est une épreuve psychologique. Pour accéder à l’une, il faut d’abord traverser l’autre en étant capable de maintenir un lien aux autres à l’intérieur de soi. La Tribune, 7 avril 2020 Pourrions-nous être pistés par géolocalisation ? La police pourrait-elle pénétrer chez nous sans autorisation ? Devrait-on dénoncer des voisins ? Les journaux devraient-ils être censurés ? Autant de questions qui, farfelues il y a quelques semaines, se posent aujourd’hui très sérieusement aux gouvernements démocratiques. Le nouveau magazine littéraire, avril 2020 « Tout le malheur des hommes vient de ne pas savoir demeurer en repos dans une chambre. » Or, c’est précisément ce qui est requis de plusieurs milliards d’individus aujourd’hui. Un confinement généralisé qui serait intolérable s’il n’impliquait pas une forme de foi, d’engagement collectif, qui nous relie les uns aux autres. Santé mentale, mars 2020 Pour dissiper l’inquiétude causée par le spectacle de la folie, nous la renvoyons à une forme atténuée de rationalité, rationalité cachée ou rationalité empêchée ; rationalité à punir pour la révéler, ou à soigner pour la rebrancher. Sauf que la folie a une fâcheuse tendance à se jouer de nos catégories. Entre punir et soigner demeure toujours une zone d’ombre. Les cahiers de la justice, mars 2020 La justice est aveugle pour punir le tort et rétablir le droit. Sauf qu’elle n’a pas qu’une vocation correctrice et rationnelle, elle a aussi une vocation politique et morale qui peut entrer en contradiction avec son impartialité et sa mesure. Santé mentale, février 2020 “Qui suis-je ?” est plus courant, mais plus insoluble, car l’identité pure est un rapport à soi sans contenu. Suis-je ce que j’étais, quand j’étais petit (psychanalyse), valide (médecine), ou responsable (droit) ? Suis-je quelque chose de constant dans le temps (âme), un présent matériel (corps) ou encore une durée (vie) ? Ce que je suis dépend du registre temporel où l’on me considère. C’est la question que posent les directives anticipées. Challenges, 12 février 2020 Les écrans ressemblent davantage à la bouche d’un ogre qu’à une fenêtre ouverte sur le monde. C’est d’ailleurs le mode principal de financement de leur contenu : retenir l’attention aussi longtemps que possible. C’est pourquoi le raisonnement ni la force ne sont suffisants pour en préserver nos enfants. Santé mentale, janvier 2020 Pourquoi les résolutions tiennent d’autant moins qu’elles sont bonnes ? parce que nous voulons changer une pièce dans un puzzle qui sera à jamais troué. On peut résister, mais quand on a la pièce manquante dans la poche, c’est jamais très longtemps. C’est le puzzle qu’il faut changer. Huffington Post, 13 janvier 2020 Qui sont Les misérables, le film de Ladj Ly ? Des pauvres irresponsables ? Des complices du système ? Ou des humains réduit au néant de leur existence? Santé mentale, décembre 2019 Le fou furieux est le plus fou, qui menace à la fois la rationalité de notre identité et la sécurité de nos relations. Pourtant, sa violence est surestimée, et par notre méconnaissance des pathologies mentales, et par une société qui considère le progrès des normes comme l’humanisation par excellence, et du coup la folie comme inhumaine. Santé mentale, novembre 2019 L’inclusion du handicap est une exigence paradoxale qui veut à la fois normaliser et inclure, adapter et servir, contraindre et libérer. Mais entre norme excluante et intégration bienveillante, c’est plutôt la première qui a prédominé jusqu’ici, et menace toujours de dévoyer la seconde. Tribune de Genève, 26 novembre 2019 L’écriture prédictive, nouvelle application de l’intelligence artificielle, est capable d’écrire les prochains mots d’une phrase, les prochaines phrases d’un paragraphe… les prochains livres d’une civilisation ? L’intelligence remplacera-t-elle aussi le “surhumain”, qu’on appelait jadis le génie ? Santé mentale, octobre 2019 En reproduisant la pensée, l’intelligence artificielle en donne une image mécanique, limpide, et trompeuse. Elle s’appuie en réalité sur l’interprétation des résultats apparemment significatifs de calculs pour simuler une pensée définie comme redoublement de l’ordre des choses. Inversement, elle renvoie la pathologie mentale à une déficience physique qu’il suffirait de réparer pour retrouver une nature homogène sous-jacente. Usbek & Rica, 16 octobre 2019 De quoi Greta Thunberg est-elle le nom ? D’une mauvaise conscience irréductible qui, du fond d’un autisme réputé à la fois fou et prophétique, nous rappelle notre propre folie destructrice. Santé mentale, septembre 2019 Peut-on donner tort au réel ? C’est la question que pose le déni, non pas seulement aux malades plus ou moins délirants, mais à l’esprit de chacun qui peut se mentir à lui-même, et surtout à notre humanité qui, face au monde plutôt qu’en lui, procède d’une forme de “retrait, d’interruption, de crispation de l’activité vitale”. La Tribune, 30 août 2019 Tel produit est-il nocif à long terme ? Tel OGM va-t-il perturber l’écosystème ? Tel médicament est-il inoffensif ? Autant de question auxquelles le fact-checking ne peut répondre avec certitude, puisqu’il n’y a pas de faits, mais des statistiques, des probabilités, des évaluations bénéfices / risques. La désinformation fleurit sur ce terreau intermédiaire entre l’exactitude des sciences physiques et l’interprétation des sciences humaines. Huffington Post, 24 juillet 2019 Les enfants doivent-il être réservés à la famille hétérosexuelle traditionnelle ou devenir un droit pour tout un chacun, y compris pour les homosexuels et les personnes seules ? Contre un hypothétique droit à l’enfant, n’y a-t-il pas un droit de l’enfant ? Par où la PMA rejoint le problème de la GPA, du commerce d’organes, de la prostitution et du lancer de nains. Santé mentale, juin 2019 La morale est ordinairement définie comme indépendante de l’intérêt. L’intérêt est égoïste, la morale altruiste. Le problème c’est qu’il n’est pas de plus puissant moteur que l’égoïsme pour financer l’altruisme, de sorte qu’on ne peut être plus altruiste qu’en étant égoïste. Comment comprendre ce paradoxe ? Challenges, 15 juin 2019 L’intelligence artificielle est-elle l’ultime phase de la sélection naturelle ou le renversement algorithmique de l’intelligence contre elle-même ? Santé mentale, mai 2019 La sexualité mêle le plus délicat et le plus bestial, le plus aimant et le plus violent, le plus personnel et le plus matériel. L’accompagnement sexuel pose donc trois questions imbriquées : la question sociale de la sécurité, la question morale de la dignité et la question psychologique de l’identité. Politis, 5 avril 2019 La seule question qui importe vraiment est la question “pourquoi ?”. Pour le “comment ?” , l’instinct et l’indifférence suffisent. Mais alors, pourquoi nous gave-t-on de “comment” au moment même où, nous éveillant au monde, nous cherchons à comprendre l’essentiel ? Challenges, 26 mars 2019 À la fois nécessité et souffrance, pouvoir et servitude, droit et privilège, le transport est un outil qui est devenu un obstacle. Comment comprendre ce paradoxe d’un véhicule qui nous assiège ? Le nouveau magazine littéraire, 20 février 2019 La médecine moderne a dilué la maladie dans la statistique, créant des maladies sans malades, et des malades sans maladie. Neurologie, psychiatrie, gériatrie, 7 février 2019 La maladie d’Alzheimer est un cauchemar absolu. Et pourtant, elle progresse insensiblement, ne fait ni souffrir, ni mourir. Paradoxe d’une gravité qui se trouve davantage dans notre regard que dans la maladie même. Usbek & Rica, 15 janvier 2019 Le privé, c’est ce que je ne veux pas que tu voies. En ce sens, la première privauté, c’est mon corps. Seulement, nombreux sont les léviathans qui veulent exposer mon espace privé. Et le premier d’entre eux sans doute, c’est moi. Comment comprendre ce paradoxe, et esquiver les dangers de l’“extime” ? Le nouvel économiste, 3 janvier 2019 La montagne des “gilets jaunes” accouche d’une souris. Que leur a-t-il manqué pour nous rapprocher de l’idéal de justice qui semblait pourtant faire l’unanimité ? Tribune de Genève, 5 novembre 2018 Jamais la médecine n’a été aussi efficace, et jamais elle n’a été aussi décriée. Comment expliquer ce paradoxe ? Elle est à la fois trop efficace pour être parfaite, trop généralisée pour être infaillible, et trop importante pour être débattue. Figaro vox, 11 octobre 2018 Les dispositifs connectés et le Big Data nous donnent la possibilité de connaître, de prévoir, de mesurer les pathologies. C’est une avancée incontestable. Mais cette mesure doit être considérée dans toutes ses dimensions, de mesure du réel (le mètre), mais aussi de mesure politique (la décision), et de mesure morale (la modération). Usbek & Rica, 29 août 2018 Les progrès de l’intelligence artificielle permettent désormais d’avoir des interactions poussées avec les robots. Mais quelle est la nature de ce dialogue ? Pour la clarifier, il faut dépasser la confusion faite entre « signification » et « sens », qui nous pousse à surinterpréter la valeur de nos échanges avec les IA. Le Journal du dimanche, 19 août 2018 Les migrants renvoient nos pays européens au principe fondateur de leur union, et donc à leur identité : sommes-nous des hypocrites prétextant les droits de l’homme pour nos intérêts ? Des idéalistes irresponsables ? des Chrétiens en devenir ? des badauds qui se trouvent là parce qu’il fait chaud et s’en vont dès qu’il fait froid ? Question difficile à résoudre parce qu’elle n’est plus de gestion (la politique), mais de vision (le politique). Le nouveau magazine littéraire, juillet 2018 “Qu’est-ce qu’un homme ?” La question qui, pour Kant, résumait à elle seule toute la philosophie prend, à l’heure de #metoo, un sens radicalement différent. Ce n’est plus : en quoi consiste l’humanité ? mais en quoi consiste la masculinité ? Or cette question pose deux pièges successifs, celui du particularisme (l’humanité divisée) et celui du moralisme (l’humanité travestie). Peut-on les surmonter d’un seul saut ? Santé mentale, juillet 2018 L’échec n’est pas seulement un accident regrettable, il peut être aussi un événement soutenu, approfondi, voire intentionnellement provoqué. Mais pourquoi se mettre soi-même en échec ? La conduite d’échec serait-elle une conduite masochiste réussie ? Mais surtout : si cette conduite consiste à se rendre malade, comment peut-elle être soignée? Le Journal du dimanche, 3 juin 2018 Le téléphone portable interdit, non pas de penser par soi-même, mais de se concentrer sur l’effort d’apprendre, qui exige de se détourner des images et des excitations faciles. C’est pourquoi l’école doit écarter le portable. Est-ce possible ? Challenges, mai 2018 Les réseaux sociaux abordent les problèmes sociaux en les radicalisant. Aussi transforment-ils les débats en crises, et les crises en catastrophes. Santé publique, janvier-février 2018 Alors même qu’elle a pour but de soigner, l’industrie pharmaceutique est plus déconsidérée encore que les cigarettiers ou l’industrie automobile. Pourquoi cette image détestable auprès de l’opinion publique ? Figaro vox, 8 janvier 2018 Le médicament connecté paraît résoudre tous les problèmes de la médecine : celui de la santé et celui de l’économie. Mais c’est au prix d’un contrôle de la vie, voire d’une aggravation de la maladie. Libération, 31 octobre 2017. Le transhumanisme nous promet un humain augmenté. Mais a-t-on jamais inventé une antibombe ? Si l’augmentation n’est que celle de notre pouvoir, elle sera pernicieuse. En confondant la quantité avec la qualité, le transhumanisme ne fait que reconduire l’imposture matérialiste, pas moins dangereuse que le fanatisme religieux qui en est l’envers. Les cahiers de la justice, septembre 2017. Sur les réseaux sociaux, la justice est dans une situation inverse à la médecine : tandis que celle-ci s’y éloigne trop du patient, celle-là s’y rapproche trop du justiciable. La justice doit redéfinir sa place dans une société à la fois plus versatile et plus exigeante. Revue droit & santé, septembre 2017. La morale nous commande de sauver notre prochain à tout prix. Mais les réalités du monde de la santé interdisent de tout donner à un individu, puisque ce serait au détriment de tous les autres. Peut-on concilier ces deux façons de penser, morale et utilitariste, pourtant contraires dans leur principe ? Tribune de Genève, 22 août 2017. Le vélo est un objet clivant car il remet en question les grands principes de nos sociétés industrielles : mobilité dangereuse, croissance productiviste, statut social, progrès technologiques, et même propriété privée. Le Journal du dimanche, 11 juin 2017. La philosophie doit-elle nous dominer du haut de son piédestal au risque de l’ennui, ou être saisie ici et maintenant au risque du scandale ? Préfère-t-on une figure pétrifiée sous les cendres, ou de la pensée risquée ? Les cahiers pédagogiques, juin 2017. On parle toujours tout seul. Pour enseigner, débattre, intéresser, il faut susciter la parole de l’autre, quelle qu’elle soit, parce qu’elle contient toujours quelque chose de juste : ce point intérieur et solide d’où l’autre part pour penser, et qui est le seul point d’épreuve de la pensée, aux deux sens d’éprouver et de tester. Dalloz avocats, mai 2017. Les avocats vont-ils être ubérisés ? C’est ce que pourrait laisser penser l’invasion des bases de données, de l’intelligence artificielle, des plateformes personnalisées dans une vie professionnelle où des macrosystèmes sophistiqués tendent à penser à notre place. Mais l’avocat n’a-t-il pas un rôle qui dépasse la simple compilation de cas, le calcul d’intérêt, la définition d’une probabilité de gain ? N’a-t-il pas vocation à faire émerger de l’écheveau des cas particuliers, en dialogue avec les parties prenantes, le principe même de la justice ? Le Plus de L’Obs, 6 février 2017 Le portable est un objet total, parce qu’il donne accès à tous les objets. Impossible de le modérer. De fait, nous en sommes tous dépendants. Faut-il donc y renoncer absolument ? N’y a-t-il aucune alternative entre une vie amoindrie et une vie amputée ? Le Plus de L’Obs, 5 octobre 2016 La voiture n’est-elle qu’un outil technologique comme un autre, ou reflète-t-elle une vision du monde, et laquelle ? On peut constater, autant dans les valeurs que dans les prises de position, que la voiture est plutôt de droite, tandis que marche, vélo, transport en commun, plutôt de gauche. Le Plus de L’Obs, 14 septembre 2016 On pourrait croire à un progrès : les drogués ne sont plus persécutés ni blâmés, mais soignés. L’addiction n’est plus un vice mais un symptôme involontaire. Or la réalité semble contredire cette conception victimaire : la drogue est non seulement choisie dans son origine et sa consommation courante, mais valorisée, sacralisée. Pour renoncer à la drogue, il ne faut pas soigner un mal, mais renoncer à un bien. C’est plus dur. Le Monde, 8 septembre 2016. Peut-on enseigner la philosophie, alors que tout enseignement transmet quelque chose, et que la philosophie consiste à penser à partir de rien ? Le Plus de L’Obs, 5 août 2016 La femme est-elle un homme comme les autres, comme le voudrait le slogan “La moitié des hommes sont des femmes” ? Ou bien y a-t-il une spécificité féminine, et laquelle ? La question de la féminité est polémique, car écartelée par l’alternative entre une identité totale et une différence irréconciliable. Qu’en est-il ? Le Plus de L’Obs, 27 juin 2016 L’Angleterre sort de l’Europe, mais l’Europe n’existe pas : elle n’est qu’une bureaucratie peu différente des autres organisations internationales. C’est surtout l’occasion de se questionner sur la forme de l’État-nation, de moins en moins adapté aux défis contemporains. Le Monde du 14 juin 2016. Le problème majeur des élèves face à la philosophie, c’est l’enseignement de la philosophie lui-même, qui s’attache davantage à compliquer les choses qu’à les simplifier. Comment dépasser cette entrave paradoxale ? En revenant à ce qu’est la philosophie : la résolution simple de problèmes simples. Marianne du 25 mai 2016 La police est caillassée parce qu’elle serait abusive, corruptrice, injuste. Mais c’est oublier que sans ordre social, aucune délibération sur ce qu’est la justice n’est possible. Seulement de quelle justice parle-t-on ? « de celle qui veut accorder à chacun ce qui lui appartient, ou de celle qui veut donner la même chose à tous ? » Le Plus de L’Obs le 6 mai 2016 La gifle a été discréditée. L’enfant serait un être bon, intelligent, capable de comprendre et d’agir en respectant des consignes claires. La gifle serait la persistance de réflexes animaux voire barbares. Mais l’enfant, n’est-il pas parfois, comme une grande personne, à la recherche de limites que les mots ne suffisent pas à maintenir ? Le Monde du 5 avril 2016. Le voile signifie-t-il l’oppression des femmes ? Qui sommes-nous pour juger ? Avons-nous vraiment fait mieux pendant des millénaires ? Et qu’y a-t-il d’immoral dans un habit consenti ? Faudrait-il également interdire les kippas ? les drapeaux gays ? les cornettes ? Le Monde des lecteurs du 28 janvier 2016. Comment peut-on sacrifier sa vie et celle des autres pour une cause discutable ? Comment peut-on survivre en conservant du sens à sa vie qui ne se réduise pas à la peur ou la haine de cette cause meurtrière ? Libération, 6 novembre 2015 Une voiture intelligente devra-t-elle foncer dans le mure et tuer son passager, ou faucher un groupe de cinq piétons sur la voie ? Les progrès technologiques, en rendant les machines de plus en plus indépendantes vis-à-vis de l’intelligence humaine, vont nous contraindre à inscrire des principes moraux dans leurs programmes. Mais lesquels ? Santé Mentale, Juin 2015. Doit-on laisser les fous en liberté, ou faut-il les enfermer pour protéger les populations ? Mais les “fous” sont-ils vraiment dangereux ? Et surtout : la privation de liberté ne serait-elle pas, sinon une cause, du moins un facteur aggravant de leur pathologie ? Il s’agira ainsi de définir la liberté, moins comme une simple capacité physique de déplacement, que par le choix global d’un projet de vie, multidimensionnel, n’excluant pas la contrainte. Lettre du Respadd, janvier 2015 Drogue et travail sont deux formes d’une même quête de sens, de reconnaissance sociale et d’accomplissement de soi. Leur rapprochement pose la question de la normalité et du sens, de l’image sociale de l’individu et de sa capacité à se choisir, c’est-à-dire de sa place dans la société et de sa liberté dans le monde. Santé Mentale, décembre 2013 Qui est l’autre ? L’autre, c’est autrui. Mais qu’est-ce qui le rend autre ? De l’étranger au proche, du rival à l’allié, l’approche philosophique permet d’explorer le concept et de définir les contours de l’autre. L’Arche Éditeur, 2013 La philosophie est la puissance même de la vie qui s’explore. Ni baume anesthésiant, ni recette toute faite, elle dialogue avec ce qui ne paraît d’abord qu’un écho affaibli, mais dévoile aux oreilles attentives l’intelligibilité du réel et les possibilités de l’action. À mi-chemin entre l’essai et l’autobiographie, ce livre raconte la découverte d’une pensée iconoclaste et salvatrice. Soins Cadres, Août 2012. L’importation du concept de bientraitance dans le management rapproche les deux termes antinomiques de l’intérêt et de la morale. La souffrance au travail apparaît comme un échec de cette conciliation entre les impératifs économiques de l’entreprise et les attentes personnelles des salariés. Comment penser ce rapprochement pourtant nécessaire ?Vision Pro : La réalité augmentée qui nous diminue
La violence dans le soin
Quand les écrans font écran
Le business du soin
Le pharmacien, entre l’arbre et l’écorce
La résurrection de l’euthanasie
L’humeur ou l’odeur du sentiment
Le sexe s’enseigne-t-il ?
Compétence ou compétition ?
Pourquoi ChatGPT est une mascarade
La fatale richesse de l’héritage
ChatGPT : Savoir absolu ou superflu ?
Trouble dans le corps
Le “Dry January”, ce carnaval inversé d’une société honteuse d’elle-même
Narcissisme et intériorité
Faut-il s’inquiéter de l’éco-anxiété ?
Le traumatisme : l’inertie du non-sens
Gynécologues : quand la réalité dépasse la fiction
La bavure de la légitime défense
L’inceste : la destructivité du même
L’inflation : fatalité ou choix de société ?
Peut-on changer le monde ?
Adolescence : crise ou trompe-l’œil ?
Le médecin : larbin ou voleur ?
Ces lunettes connectées qui nous rendent aveugles
Pourquoi ment-on ?
L’alchimie des conflits
L’anorexie : l’autarcie cannibale
L’accueil, la grammaire des relations
Le cauchemar de l’enfant rêvé
Le clash des communications
Ce que peut le corps
La castration de la bienveillance
La résistance vaccinale repose sur la méfiance envers les élites
Alzheimer : une maladie des relations
Se libérer de ou par l’enfermement ?
La chasse aux sorcières des antivax
Dette covid : du soin à l’amputation
Voitures autonomes ou conducteurs irresponsables?
Fallait-il sauver la philosophie ?
Rechute ou retrouvailles ?
Cancel culture : Faut-il enterrer Blanche-Neige ?
Le singe descendra-t-il de l’homme ?
Peut-on s’adapter à tout ?
Comment trier les patients ?
Le viol doit-il violer le droit ?
Seul Dieu peut se suicider
L’utopie martienne
L’animal : Bisounours ou Minotaure ?
Trump : le pouvoir de la folie
Transsexualité : maladie ou fatalité ?
La rumination : la pensée de trop
Le pan-médicalisme
La guerre de religion états-unienne
Du séparatisme à l’ensauvagement
La 5G et le chantage au progrès
L’appel de la folie
Pour en finir avec la dictature du bruit
Quand la distanciation sociale masque une séparation politique
Le soin des héros
Vivre libre ou mourir
Que signifie guérir ?
Faut-il déboulonner le passé ?
L’illusion de l’enseignement à distance
Jusqu’où aider quelqu’un ?
Les Anciens y auraient vu une punition
Rester seul…
Le coup d’État du coronavirus
Le confinement, une expérience pascalienne
Faut-il punir les fous ?
Un procès pour les victimes ?
Quand suis-je ?
Quand les écrans dévorent nos enfants…
Hier, j’arrête de boire !
Qui sont Les misérables ?
Le fou furieux
Le handicap est-il asocial ?
Y a-t-il un génie artificiel ?
Peut-on lire la pensée dans le cerveau ?
Greta Thunberg, le surmoi de l’Occident
Le miroir du déni
La santé des fake news
De quoi la PMA accouche-t-elle ?
Le souhaitable et le possible
Intelligence artificielle : Darwin ou Kubrick ?
Le sexe est-il un droit ?
Le “pourquoi ?” de l’école
Quand le transport favorise l’isolement
De quoi sommes-nous malades ?
Alzheimer : La mémoire du néant
Peut-on sauver notre vie privée ?
Pourquoi les “gilets jaunes” s’effilochent
De quoi la médecine est-elle malade ?
Peut-on “mesurer” la santé ?
Nous ne parlerons jamais avec les robots
Migrants : le retour du politique
La virilité est-elle indésirable ?
L’échec est-il une maladie ?
Interdire le portable à l’école ? Vital et impossible.
Les réseaux sociaux nous rendent-ils asociaux ?
Peut-on défendre l’industrie pharmaceutique ?
La médecine connectée : performance ou culpabilisation ?
Transhumanisme, à côté du bonheur.
Quelle justice sur les réseaux sociaux ?
La santé est-elle négociable ?
La panique morale du vélo
Faut-il vulgariser la philosophie ?
Prêcher la mauvaise parole
L’avocat est-il robotisable ?
Comment je me suis évadé de mon téléphone portable.
La voiture est-elle de droite ?
Est-on responsable de son addiction ?
Peut-on enseigner la philosophie ?
Qu’est-ce qu’une femme ?
Le Brexit n’existe pas
Cartonner en philosophie
Doit-on aimer la police ?
Faut-il gifler les enfants ?
La mode est-elle fondamentaliste ?
Comment résister au sens du martyre ?
La voiture autonome doit-elle se suicider ?
Emprisonner la folie ?
Une ou des addictions ?
L’autre est-il fou ?
La chose qui donne à penser
Peut-on être un bon boss ?